Les traits du français de Belgique francophone
Etude des belgicismes
Les belgicismes sont des productions langagières d’ordre phonétique, lexical, syntaxique, morphologique, identifiées, à tort ou à raison, comme étant typiques du français de Belgique.
L’identification des belgicismes se mesure à l’aune du français standard, que l’on peut définir comme une variété de langue dans laquelle tous les membres d’une communauté linguistique acceptent, bon gré mal gré, de se reconnaître. Ce que les francophones ont en commun, ce n’est pas la pratique de la même variété : c’est de pouvoir se reporter à un même modèle idéalisé de langue, qu’ils nomment « le français ». Une langue standard connaît souvent une forte institutionnalisation. On entend par institution linguistique tous les appareils qui déterminent les règles sociales de l’échange linguistique : enseignement, dictionnaires, grammaires, chroniqueurs de langages, organismes gouvernementaux ou non gouvernementaux, législation linguistique, médias audiovisuels, etc.
Belgicismes lies à la morphologie ou à la syntaxe[1]
Des périphrases verbales :
Avoir bon
Avoir facile/difficile/dur[2]
Ça ne veut pas réussir
Ça ne peut mal
Il n’en peut rien
Des utilisations absolues de verbes transitifs :
courtiser, fréquenter
purger
mettre auprès/ tout près
ça goûte ?
Des utilisations de régimes indirects au lieu de régimes directs :
Demander après x
S’accaparer de x
Ça ne lui regarde pas
Des utilisations de régimes directs au lieu d’indirects
Jouer soldat
Je l’ai besoin*[3]
Des pronoms :
Vous me direz quoi[4]
Tout qui
Leur deux[5]
Gagner autant par mois
Il sonne
Il pue
Il sent le brûlé
Des prépositions et des conjonctions :
Qu’est-ce que c’est pour un x ?[6]
Je tiens pour x
En rue (archaïsme – cf. en pleine rue)
Endéans 10 jours
Aller au coiffeur / au médecin*
Confiture aux fraises/prunes/abricots
Confiture de fraises/de prunes/d’abricots
Profiter avec le beau temps
Mettre à place
Avoir des chaussures dans ses pieds (wallonisme)
Se fâcher sur qqn
Ça fait que
À fait que
D’abord que
Des adverbes :
Moi bien (flandricisme – il wel)
Avoir x francs trop peu
Aussi vite (flandricisme – si vite sur zo gauw)
Là tout de suite
A tantôt
Des redondances :
Au plus……au plus
Trop…. que pour
Il y en a de ceux qui (archaïsme)[7]
Sur le temps que (+ indicatif)
Parce qu’aussinon
Par après
Quiconque
Pour moi lire[8]
Jouer avec (flandricisme – Smaakt het ?)
S’accoucher
Se divorcer
Non fait
Si fait
Assez bien de
Dites-moi une fois
Des inversions :
Ça, je sais
Avoir de l’argent assez
Des commutations :
Faire pour un mieux
Fort pâle
Des locutions idiomatiques :
Il n’y a pas d’avance
Renseigner qqch. à qqn
S’il vous plaît
Il se fait que
Tirer son plan
Avoir un œuf à peler
Tourner fou/folle
Tenir le fou avec qqn
Sur le temps que (+ indicatif)
Parce qu’aussinon
Par après (archaïsme)
Quiconque qui
Pour moi lire
S’accoucher
Se divorcer
Non fait
Si fait
Assez bien de
Antéposition de l’épithète adjectif qualificatif : adjectif + nom
Du sale linge
Une propre chemise
(influence du wallon et proximité des idiomes germaniques qui privilégient la structure Adj. + Nom)
Empiètement de savoir sur pouvoir
Belgicismes lies au lexique[9]
Le texte ci-dessous[10] qui recèle des particularités lexicales du français de Belgique. Pouvez-vous identifier ces belgicismes ?
La vie professionnelle : vocabulaire économique et social
Périodiquement, les employeurs sont tenus de péréquater les salaires, en tenant compte des hausses de l’index. Certains citoyens sont amenés à prester des heures supplémentaires ou à travailler au noir pour arrondir leurs fins de mois. Certains ne touchent que le minimex. De leur côté, beaucoup d’étudiants cherchent à jober dans le secteur de la grande distribution : engagés comme jobistes, ils travaillent comme caissiers, réassortisseurs de rayons ou manutentionnaires.
Il arrive que celui qui désire acquérir un bien doive prêter de l’argent pour payer se maison ou sa voiture. Pour mettre fin au bail de l’habitation qu’il occupe, un locataire donnera son renom (ou renon).
À l’école gardienne, les enfants s’amusent bien. Entre l’heure de midi, les petits font la sieste. Ils disposent chacun d’un coussin avec une taie. L’un ou l’autre fait toujours sa macrale. A l’école primaire, l’enfant cherche à être dans la manche de l’instituteur.
Le régendat forme les régents qui sont habilités à enseigner dans les classes du degré inférieur du secondaire.
À l’athénée, certains élèves ont dur alors que d’autres brossent les cours. Les bisseurs et les bisseuses ont tendance à voir dans le bon élève un manche-à-balles. Avant l’introduction de l’enseignement rénové ou du rénové, c’étaient les humanités, humanités anciennes de préférence, qui préparaient à l’université où le student suit les cours dans un auditoire. Les informations sont affichées aux valves. Les étudiants se retrouvent pour guindailler et faire des à-fond. On appelle kot la chambre ou le petit appartement loué à un étudiant, dit cokoteur.
Certaines formations complémentaires se fondent sur des prérequis. Avant les examens, on bloque ses syllabus. Selon les universités, c’est la bloque, le bloc ou le blocus. En première candi’, beaucoup d’étudiants sont busés aux examens. Les autres réussissent sans grade (ils n’obtiennent qu’une satisfaction) ou avec grades : dis(tinction), grande dis(tinction) ou la plus grande (distinction).
A la fin de sa dernière année académique, le professeur ordinaire est admis à l’éméritat.
Les attitudes et les représentations linguistiques en Belgique francophone
Introduction
Les études sur les attitudes linguistiques des Belges francophones
Le texte ci-dessous[11] qui recèle des particularités lexicales du français de Belgique. Pouvez-vous identifier ces belgicismes ?
La Belgique et ses structures : vocabulaire administratif[12]
La Belgique est un Etat fédéral qui se compose de trois communautés (française, flamande et germanophone) et de trois régions (wallonne, flamande et bruxelloise). Les problèmes dits communautaires concernent chacune des communautés linguistiques ou les relations entre elles. La Croix-Rouge, par exemple, est communautarisée, ce qui signifie qu’elle a été transférée de la compétence nationale à la compétence de chacune des communautés. Seuls deux de ses centres d’activité qui se rapportent à la communauté flamande et à la communauté française restent bicommunautaires. Les matières résiduaires ne sont pas explicitement de la compétence des communautés et des régions.
A la maison communale, siègent le bourgmestre et les échevins. C’est l’échevin de l’état civil, par exemple, qui remet le livret de mariage aux nouveaux mariés. Il arrive que l’on fête les vingt ans de maïorat ou de mayorat d’un bourgmestre maïeur ou mayeur. Les communes où des facilités sont prévues pour une minorité linguistique s’appellent communes à facilités.
La région bilingue de Bruxelles-Capitale est dirigée par un ministre-président. Un des objectifs pour cette région est d’améliorer l’environnement urbain d’ici à l’an 20054. ainsi certaines communes ont-elles déjà installé des horodateurs et parcmètres qui permettront une meilleure rotation des voitures garées. Afin de réduire les embouteillages qui asphyxient la ville, on incite plus de navetteurs à se rendre à Bruxelles au moyen des transports en commun. Pour améliorer l’image de marque de la capitale de l’Europe, les hommes du bac ramassent les ordures ménagères entre 19 et 24 heures et on veille à empêcher le surcollage et les panneaux pirates. Sur base d’évaluations, l’on prévoit aussi des subsides pour réparer les bandes de roulage du ring de Bruxelles ainsi que plusieurs drèves à l’entrée de la capitale.
Une attitude ambivalente à l’égard du français de France
Une corrélation entre l’insécurité linguistique et le niveau d’instruction
Le texte ci-dessous[13] qui recèle des particularités lexicales du français de Belgique. Pouvez-vous identifier ces belgicismes ?
La vie quotidienne : l’habitation et son entretien
Les Belges ne sont pas après leurs sous en ce qui concerne leur maison. Certains habitent une maison bel-étage ; d’autres, une maison unifamiliale, achetée par fois clé-sur-porte. Dans la place de devant, que l’on garnit de postures et de ramasse-poussière, ils ne font plus placer du balatum, mais du tapis plain et, si possible, font aménager un feu ouvert.
La cuisine, qui n’est généralement plus une cuisine-cave, est équipée d’un boiler. La lessiveuse, qui sert à laver les blancs et les bleus, et la calandre sont placées dans la laverie. La ménagère dispose, entre autres, de casseroles, d’une casserole à pression, d’assiettes profondes, de sous-plats et de lèche-plats.
Pour qu’il fasse propre dans la maison, la femme d’ouvrage ou la femme à journée se sert d’un mop qui ramasse les minous, d’une loque à reloqueter et d’une raclette. Elle prend les poussières avec une loque à poussière ou une chamoisette. Elle monte sur une escabelle pour placer les tentures.
La norme belge
Distance par rapport à la norme française
Distance par rapport aux usages populaires
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La vie quotidienne : l’alimentation
Chez le légumier, on trouve de la salade, de la salade de blé, des chicons, de l’endive. On peut aussi acheter les fruits nécessaires pour faire de la compote aux pommes ou de la confiture aux fraises.
Au restaurant, le moule-frites s’impose. En hiver, on apprécie les carbonnades flamandes et le waterzooi. Pour manger un bout, l’on choisit des maatjes, un filet américain ou simplement un steak cannibale avec de l’eau spitante ou une bière belge.
La kermesse, avec ses moulins ou ses carrousels, ses fritures, ses caricoles (ou caracoles), ses croustillons et ses smoutebolles, ses boules, ses stands de tir et ses attractions plaisent aux petits et aux grands, même s’ils doivent faire la file avant d’être servis.
Quelques belgicismes (identiques à ceux du syllabus de grammaire)
Pouvez-vous indiquer le correspondant de ces belgicismes en français standard ?
– Une année académique :
– Le quart d’heure académique :
– Recevoir les palmes académiques :
– Avoir un grade :
– Etre en affaire (« Elle est tout en affaire depuis que son petit-fils est né ») :
– Faire un à-fond :
– Un auditoire :
– L’homologation du diplôme :
– La défense de thèse / du mémoire (de fin d’études) :
– Le promoteur de thèse / du mémoire (de fin d’études) :
– Etre en aveu :
– Entrer en aveu(x) :
– Un ballotin de pralines :
– Il m’en est arrivé une belle :
– la berme centrale :
– moi bien (Ce n’est pas un juillettiste, moi bien !) :
– une bisbrouille :
– bisser :
– Être bleu de qqn. :
– être en [période de] bloque [en bloc (Bruxelles), en blocus (Louvain)] :
– une chique (à Liège), une boule (à Bruxelles) :
– avoir le brûlant (ou le brulant, RO) :
– être en boni / être en mali :
– le bottin :
– brosser un cours :
– buser qqn. :
– un caddie :
– des carabistouilles :
– un kot :
– tomber comme un cheveu dans la soupe :
– chercher misère à qqn. :
– une clinche :
– un clignoteur :
– une cloche (au pied) :
– le secrétaire communal :
– la fête communale :
– un copion :
– un employé bien coté :
– coter un travail :
– « C’est le dernier de tout ! » :
– le déjeuner, le dîner, le souper :
– une dia, des dias :
– un doctorant :
– la femme d’ouvrage :
– doubler une classe :
– un doubleur :
– Il drache :
– une dringuelle :
– une tirette :
– Encore un peu j’oubliais les dossiers ! (wallonisme)
– Encore bien qu’il faisait beau !
– Endéans un mois
– un essuie/un essui (pour la vaisselle)
– un torchon (qui sert à nettoyer le sol)
– un essuie/un essui
– un évier (qui sert à se laver)
– se faire mal (de qqn., de qqch.) : Je me fais mal
de ce chien
– une farde
– faire la file
– un filet américain
– un pain français
– un frotte-manche
– un goulafe
– une gosette aux cerises
– ça vous goûte ?
– guindailler
– Il est dix heures quart
– Il est dix heures moins quart
– Je n’en peux rien ! (à Liège)
– S’il vous plaît (plait), s’il te plaît (pour présenter
un objet, offrir qqch.)
– S’il vous plaît ? (pour faire répéter qqch.)
– homologuer un diplôme
– J’ai idée d’aller manger une crème glace
– L’index (des prix)
– Le préfixe (pour les numéros de téléphone)
– Il est jouette
– un journal de classe
– un kot
– un mêle-tout
– un minerval
– mofler un étudiant
– minoriser, minorisation (des francophones)
– un navetteur
– faire de son nez
– une nominette
– septante et nonante
– avoir un œuf à peler avec qqn.
– le parlophone
– un pensionné (« faux » belgicisme)
– Il y a dix euros trop peu
– un péteux, une péteuse
– jouer un pied de cochon à qqn.
– à l’avant-plan
– Tire ton plan !
– du tapis plein [écrit aussi tapis plain]
– faire les pauses
– poser un acte
– postposer une réunion
– faire régime
– prendre les poussières
– la ramassette
– enlever les plumetions (ou les minous)
– Il ne peut mal
– Je n’en peux rien
– On a bon ici
– J’ai facile en histoire
– Il a difficile ces temps-ci
– J’ai dur
– J’ai le temps long
– Il a mal ses pieds
– Mets des chaussures à tes pieds !
– Il en a après moi
– Il a quelqu’un
– des pralines
– une jatte de café
– demander un livre à prêter
– appliquer la priorité de droite
– C’est une femme éthique : elle n’arrête pas de
nettoyer
– Elle raccuse tout le temps !
– Il a tellement couru qu’il n’arrive pas à se ravoir
– le percepteur des postes
– le receveur des contributions
– c’est recta
– donner son renon à un locataire
– Pouvez-vous nous renseigner le bon chemin ?
– Remettre son déjeuner
– Consultez les livres repris dans la bibliographie
– Je ne me retourne pas pour si peu
– Prendre le ring
– avoir des ruses avec qqn
– faire des ruses à qqn
– une sacoche
– un sachet du supermarché
– il a un air saisi
– une sous-tasse
– un enfant spitant
– en stoemelings
– subsidier
– une action subsidiable
– À tantôt
– de la tête pressée
– une tirette
– tirer une tête
– tourner à rien
– la vacature d’un emploi
– rapporter les vidanges au magasin
– un zievereer
– un zinneke
– une zinne
– zwanzer
[1] Les belgicismes de prononciation ont été étudiés au cours de linguistique.
[2] Emploi attesté en Normandie et ne Bourgogne.
[3] Présent également dans le registre populaire du français de France.
[4] Emploi attesté dans le Nord
[5] Emploi attesté en Bretagne.
[6] Emploi attesté en Savoie.
[7] En ancien français : assez i ot de ceux.
[8] Emploi attesté dans le Nord et le Nord-Est.
[9] Voir les exercices du syllabus.
[10] Ce texte, construit à partir de phrases relevées dans des journaux et des hebdomadaires parus en 1993 ou 1994, a été publié dans Blampain, D., et al., Le français en Belgique, Louvain-la-Neuve, Duculot, 1997, pp. 193-199.
[11] Ce texte, construit à partir de phrases relevées dans des journaux et des hebdomadaires parus en 1993 ou 1994, a été publié dans Blampain, D., et al., Le français en Belgique, Louvain-la-Neuve, Duculot, 1997, pp. 193-199.
[12] Ce texte, construit à partir de phrases relevées dans des journaux et des hebdomadaires parus en 1993 ou 1994, a été publié dans Blampain, D., et al., Le français en Belgique, Louvain-la-Neuve, Duculot, 1997, pp. 193-199.
[13] Ce texte, construit à partir de phrases relevées dans des journaux et des hebdomadaires parus en 1993 ou 1994, a été publié dans Blampain, D., et al., Le français en Belgique, Louvain-la-Neuve, Duculot, 1997, pp. 193-199.
[14] Ce texte, construit à partir de phrases relevées dans des journaux et des hebdomadaires parus en 1993 ou 1994, a été publié dans Blampain, D., et al., Le français en Belgique, Louvain-la-Neuve, Duculot, 1997, pp. 193-199.
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